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Également dénommée saut en rouleau dorsal, cette technique, utilisée en saut en hauteur, consiste à franchir la barre en l’enroulant avec son dos. Son efficacité est telle qu’elle est désormais utilisée par tous les sauteurs. On attribue la paternité de ce geste à l’Américain Dick Fosbury, sacré champion olympique aux Jeux de Mexico. À tort…
S’il a amplement contribué à sa démocratisation, Dick Fosbury n’est pas l’inventeur du saut en rouleau dorsal qui porte désormais son nom. En 1963 dans le Montana, cinq années avant son titre olympique obtenu aux Jeux de Mexico, un certain Bruce Quande était photographié en pleine action. Immortalisé en train de franchir, en rouleau dorsal, une barre placée au-delà des deux mètres. Une technique qu’il aurait commencé à utiliser dès 1959, à une époque où les meilleurs sauteurs privilégiaient le rouleau ventral ou costal.
Côté féminin, la jeune Canadienne Debbie Brill était elle aussi une pionnière. Dès ses douze ans, elle mettait au point sa propre méthode de franchissement, dénommée Brill Bend (L’incurvement de Brill), très similaire à un rouleau dorsal. En 1969, Debbie devenait la première canadienne à franchir une barre placée à six pieds (1,82 m), âgée de seulement seize ans.
Hélas, les bouquins d’histoire ne retenaient ni le nom de Bruce Quande, ni celui de Debbie Brill. Dick Fosbury brilla aux Jeux de Mexico avec une technique qu’aucun athlète n’avait jusque-là utilisé en compétition internationale, les observateurs lui attribuèrent la paternité de ce geste et lui donnèrent son nom.
S’il ne l’a pas inventé, Dick Fosbury a mis en lumière le rouleau dorsal
Dick Fosbury s’était-il inspiré de Bruce Quande et Debbie Drill ? Il semblerait que non. Très peu à l’aise avec les sauts en ciseau ou en rouleau ventral, l’athlète américain aurait instinctivement adopté cette méthode, sans savoir que dans un État proche de l’Oregon (son lieu de résidence), Bruce Quande utilisait déjà cette technique.
Malgré l’œil dubitatif des juges, vérifiant que le rouleau dorsal n’enfreignait pas les règles du saut en hauteur, et le scepticisme de son entraîneur habitué à enseigner le rouleau ventral, Dick Fosbury s’acharnait à perfectionner son geste. Ces efforts payèrent. Quelques mois avant les Jeux de 1968, il décrochait le titre universitaire en franchissant une barre placée à 2,19 mètres. Un nouveau record personnel, battu peu de temps après grâce à un bond à 2,21 mètres, lors des sélections américaines organisées à Los Angeles. Dick Fosbury détenait la meilleure performance mondiale de l’année, il s’envolait vers Mexico avec le plein de confiance.
Dossard n°272 agrafé sur le maillot, Fosbury survola le concours olympique. Dans le stade de Mexico perché à 2 200 m d’altitude, le sauteur américain tutoyait les étoiles et réalisait un sans-faute. 2,03 m, 2,09 m, 2,14 m, 2,18 m, 2,20 m, 2,22 m. La barre montait et Dick Fosbury les franchissaient dès son premier essai. À ce stade de la compétition, ils n’étaient plus que trois en lice. Celui qui avait tourné le dos aux méthodes conventionnelles amusait le public avec son rouleau dorsal novateur. N’ayant lui aussi connu le moindre échec, le Soviétique Valentin Gavrilov échouait à 2,22 mètres et se parait de bronze. Le duel final allait opposer Fosbury à son compatriote Ed Caruthers, avec comme juge de paix une barre à 2,24 mètres, placée six centimètres au-delà du précédent record olympique.
Dick Fosbury échouait lors de ses deux premières tentatives, Ed Caruthers ne faisait mieux. Au troisième et dernier essai, le rouleau dorsal l’emportait. La barre ne trembla guère, Fosbury était sacré champion olympique. L’athlète de 21 ans remportait le plus prestigieux titre de sa carrière et révolutionna à tout jamais sa discipline, en exposant sur la scène internationale une méthode que personne n’avait utilisée à un tel niveau.
Quatre années plus tard, vingt-huit des quarante sauteurs masculins présents aux Jeux de Munich utilisaient le rouleau dorsal.