Quand les footballeurs ont-ils commencé à simuler ?

Quand les footballeurs ont ils commencé à simuler ?

Tous les spectateurs vous le diront : ce comportement agace. Au football, certains joueurs sont réputés pour avoir la fâcheuse tendance à tomber un peu trop facilement et se tordre de douleur comme si on venait de leur arracher un membre. Un geste d’antijeu que l’on nomme simulation, faisant désormais tristement partie intégrante de l’ADN de cette discipline. Mais quand est-ce que ce fléau du football est-il apparu ?

La simulation née suite à l’invention du penalty ?

Son inventeur n’est pas connu et la première simulation de l’histoire n’est pas datée. Au football, il y a fort à parier que la naissance de la simulation coïncide avec la création de cette discipline, comme tricher en sport est aussi vieux que les premières compétitions. Lorsque l’on est rusé d’esprit est dénué de tout fair-play, il est en effet facile de se laisser tomber à même le sol et faire croire une faute adverse dans le but d’obtenir un avantage. Et si durant les premières années du football cet avantage que pouvait accorder l’arbitre se résumait essentiellement en un coup franc tiré depuis le lieu de la faute (ou de la simulation), la donne changea au début des années 1890 avec la naissance du penalty.

Imaginé par un gardien de but nord-irlandais apeuré des tacles et des coups toujours plus violents dont il était témoin dans sa surface de réparation, le penalty entra dans le règlement du football en 1891 en tant que 14e loi. Dès lors, une faute commise par un défenseur dans sa surface de réparation entrainait un coup de pied direct frappé à onze mètres des buts et sans possibilité d’y glisser un mur devant.

Contrairement aux précédents coups francs qu’accordait l’arbitre même en cas de faute dans la surface de réparation, le penalty offrait cette fois-ci une franche occasion de but très souvent couronnée de réussite. Pour les plus sournois, simuler devenait alors très intéressant. Mimer une chute ou une blessure à quelques mètres des buts adverses pouvait faire basculer le sort d’une rencontre si le penalty qui s’en suivait était converti. Mais à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, la simulation restait une technique relativement peu répandue tant elle était perçue d’un mauvais œil par les joueurs.

La professionnalisation du football et l’envie de gagner à tout prix

La donne changea durant l’entre-deux guerre et la professionnalisation du football en Europe, un phénomène qui jusque-là se cantonnait au championnat anglais. D’une discipline pratiquée avant tout pour le divertissement qu’elle procurait, le football devenait un sport où des sommes d’argent rentraient en jeu et pouvaient permettre à certains joueurs d’en vivre à condition d’enchainer avec leurs clubs les bons résultats. En d’autres termes, gagner n’était plus la cerise sur le gâteau venant couronner un beau match de football, mais cela devenait une nécessité pour assurer la pérennité de sa carrière. 

Bien qu’elle restât encore relativement peu répandue, la simulation se mit ainsi à gagner quelques adeptes prêts à tromper le jugement de l’arbitre afin d’obtenir un penalty ou l’expulsion d’un joueur adverse. Si dans les années 1920 il n’était pas rare de voir certains joueurs rendre sportivement le ballon à l’adversaire s’ils estimaient avoir obtenu un coup-franc immérité, durant les décennies qui suivirent, ce fair-play s’estompa peu à peu face à la volonté absolue de victoire qu’animait les joueurs. Payés pour gagner, la philosophie des footballeurs évolua. La victoire prévalait sur le reste, quitte à l’obtenir en simulant et en allant à l’encontre des valeurs de sportivité qui pourtant, restaient chères à de nombreux joueurs.  

Des années 1970 aux années 1990, la simulation à son paroxysme

Tandis que les enjeux financiers grimpaient en flèche, l’art de se laisser tomber suivait cette même tendance. Au fil des Coupe du Monde, certaines nations se distinguaient tristement par leur maitrise du plongeon et le jeu d’acteur de leurs joueurs, se tordant de douleur au sol comme s’ils venaient de se casser la jambe.

Faut dire qu’à cette époque on assista à une nette chute du nombre de buts inscrits par match. Fini l’ère des scores fleuves et des attaquants prolifiques. À partir des années 1970 le secteur défensif refit son retard sur le secteur offensif, les tactiques et systèmes de jeu adverses étaient analysés pour être mieux contrés si bien que, les oppositions entre deux équipes débouchaient fréquemment par de longues phases de neutralisation. Pour prendre l’avantage au tableau d’affichage, les attaquants, ayant désormais la vie dure, ajoutèrent la simulation à leur palette technique. À la moindre petite touchette dans la surface de réparation ils se laissèrent tomber au sol, criaient et se tenaient une partie du corps qui parfois ne correspondait pas à l’endroit où ils avaient reçu l’impact. Les joueurs le savaient très bien, le corps arbitral s’avérait être très peu expérimenté face à ce genre de situation. Bien moins professionnels que maintenant, peu capables de différencier la véritable faute d’un geste de simulation et surtout guère aidé par un règlement qui n’avait encore apporté aucune réponse à ce fléau, ces derniers portaient facilement le sifflet à la bouche et accordaient trop généreusement un penalty ou un carton à l’adversaire.

La Coupe du Monde de 1990 marque le paroxysme de la simulation. Cette édition, la plus pauvre en but de l’histoire du mondial, a vu une véritable flambée du nombre de penalty sifflés au fur et à mesure que la compétition avançait. Des sept réalisations inscrites lors des quarts-de-finale, quatre d’entre elles le furent sur penalty. Lors de la finale, l’Allemagne de l’Ouest s’imposa sur le plus petit des scores grâce à un penalty très litigieux obtenu en toute fin de rencontre. Vivement critiqué pour le manque de spectacle sur le terrain, les acteurs étaient en ce mondial plus de sortie que les véritables footballeurs.

Alors, la FIFA décida de réagir au cours des années 1990 et fit entrer en 1999 la simulation au règlement du football gardé par l’IFAB. Dès lors, tout joueur coupable d’un geste d’antijeu tel le fait de se laisser volontairement tomber par terre pouvait être sanctionné d’un carton jaune. Couplée à la professionnalisation des arbitres qui savent désormais mieux distinguer une faute d’un plongeon, on aurait pu imaginer que ces nouvelles mesures puissent quelque peu dissuader les professionnels de la chute simulée. Ce ne fut guère le cas. Mais à défaut de l’éradiquer, la simulation est désormais encadrée. Ces dernières années, certains joueurs usant un peu trop de ce subterfuge ont parfois été réprimés par une expulsion ou un match de suspension. 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *