Encerclé par l’aigle allemand, le lion britannique et le taureau espagnol, le coq Français, lui, se démarque particulièrement de ses emblèmes nationaux voisins. Il n’est ni un félin, ni un rapace, et pourtant, ses valeurs de courage et de bravoure en font de lui une fierté pour tout un peuple français à tel point que sa silhouette et son allure fière soit apparente sur les maillots des équipes nationales tricolores. Mais alors, pourquoi le choix d’un tel emblème ?
Une origine antique : Le coq, d’un jeu de mot satirique à un symbole élogieux
Nous devons la naissance de ce symbole tricolore aux Romains. En proie à une intense rivalité avec les gaulois, ces derniers avaient constaté que dans leur langue latine, le terme « Gallus » possédait une double signification : « Coq » et « Gaulois ». Ce jeu de mot fraichement trouvé, il fut fortement repris comme moyen de raillerie à l’égard des Gaulois, en les comparant à cet animal de basse-cour à la réputation jusque-là peu glorieuse. Oui, malgré son caractère intrépide, le côté belliqueux du gallinacé primait sur ses qualités si bien que les contemporains de l’époque associaient cet animal à la luxure, la bêtise ou encore la colère.
Une réputation sulfureuse qui se poursuivit durant la première partie du Moyen-Âge. La Gaule (devenue entre-temps romaine) ayant laissé place au Royaume de France, les rivalités avec les royaumes voisins fit renaitre cette association pour péjorative liant le coq aux Français. Les intellectuels britanniques et germaniques de l’époque s’amusèrent à rédiger des pamphlets satiriques à l’égard des français, au sein desquels la comparaison entre ce peuple et l’animal de basse-cour était utilisé en guise de moquerie.
Qu’à cela ne tienne. La comparaison entre le coq et les français étant ancrée partout en Europe, la royauté et les intellectuels de l’hexagone transformèrent cette vilaine association en un symbole de gloire. Pas question que le coq soit assimilé à des valeurs si péjoratives comme le prônait les royaumes voisins. Désormais, il fallait corriger cette réputation sulfureuse et faire du coq un symbole élogieux à l’égard de la France et des Français, en vantant notamment le courage et la bravoure si caractéristiques de cet animal de basse-cour. Le mythe du coq gaulois, majestueux et fier, était en marche.
Dès la Renaissance, il devenait un emblème de la royauté française à tel point que sa silhouette s’immisçât dans les représentations officielles du Roi de France. Au château de Versailles, Louis XIV fut l’initiateur d’un motif architectural français mettant le coq et la fleur de Lys au centre des divers ornements décoratifs.
La popularisation du coq comme emblème de la France à travers l’histoire
Mais la popularisation de cet emblème s’opéra véritablement durant la Révolution française. Le coq devenait le symbole de tout un peuple libéré de la monarchie absolue et d’un état qui pour la première fois de son histoire, allait adopter en 1792 la République comme système de gouvernance.
Pour autant, son utilisation ne convenait guère à tout le monde. Devenu premier consul suite à son coup d’Etat du 18 Brumaire (9 novembre 1799), Napoléon 1er se proclama empereur des Français en 1804 et envoya à cette même occasion le coq aux oubliettes. Oui, estimant qu’un tel animal ne pouvait être le symbole de la puissance de la France, il refusa de l’adopter comme emblème national. Il lui préféra l’aigle de l’empire Romain.
Mais le rapace n’eut à peine le temps de faire son nid dans l’hexagone qu’aussitôt l’Empereur français était exilé sur l’île Sainte-Hélène et la royauté à nouveau balayée. Le coq redevenait un symbole national.
Durant l’épisode des trois glorieuses mettant fin au règne de Charles X, une ordonnance datée au 30 juillet 1830 imposa la présence du coq en haut de l’étendard du drapeau tricolore ainsi que sur les boutons des officiers de la garde nationale. Puis, au milieu du XIXème siècle, ce fut sur les sceaux de la Seconde République que sa silhouette fit irruption.
Après un nouvel épisode de mépris entre le coq et cette fois-ci Napoléon III, neveu de Napoléon 1er, ce gallinacé connut ses premières heures de gloire sous la IIIe République. Le premier régime politique durable de l’ère post-Révolution durant lequel le coq était gravé sur les pièces de monnaies françaises et qu’une statue en or de ce dernier fut installé au sommet de la grille du parc du Palais de l’Élysée. Le coq Gaulois avait trouvé sa juste place. Il continuera à être utilisé comme symbole tricolore puis comme outil de propagande lors des deux guerres mondiales. De nombreuses affiches placardées sur les murs vulgarisaient cet affront franco/germanique par un duel entre le coq et l’aigle impérial prussien.
L’arrivée du coq Gaulois dans le sport
S’il n’est pas officiellement considéré comme un emblème de la République Française, en sport, son utilisation et sa représentation sur les maillots des équipes nationales reste largement dominante.
La première représentation d’un coq sur le maillot d’une équipe nationale remonte à 1909. Cette année-là, l’Equipe de France de football, créée cinq ans plus tôt passait sous l’égide du Comité Français Interfédéral (CFI) au dépend de l’Union des Sociétés Françaises de Sport Athlétique (USFSA) régissant jusque-là les sélections des joueurs tricolores (La FFF n’existant pas encore). Afin de se distinguer de l’USFSA qui apposait son logo sur les maillots de l’Equipe de France (Deux anneaux, un rouge et un bleu), le CFI innova et choisissait le coq Gaulois comme emblème à afficher sur la poitrine des joueurs.
Repris par la Fédération Française de Football lors de sa création en 1919, de nombreuses autres sélections nationales emboitèrent le pas. Le XV de France le porta dès 1912, puis la délégation olympique tricolore l’affichait pour la première fois sur ses tenues lors des Jeux d’Anvers de 1920 et ce, malgré le désaccord d’un certain Pierre de Coubertin qui jugeait ce symbole « humiliant et grotesque » à l’égard des sportifs français.