Du premier dispositif en argentique utilisé en 1912 aux Jeux de Stockholm à nos jours, plus d’un siècle d’innovation ont permis à la photo-finish de devenir un outil d’une extrême précision, permettant de départager deux athlètes que l’on classerait ex-aequo à l’œil nu. Perfectionné au cours des années 1930 sur les hippodromes américains, ce procédé est devenu en 1948, grâce au chronométreur officiel Omega, un outil indispensable des Jeux Olympiques. En 1992, à Barcelone, les athlètes pouvaient désormais être départagés au 1/1000e de seconde près. Et comment fonctionne cette technologie de nos jours ?
La photo finish n’est pas une photo
Ce qui explique en premier lieu pourquoi les coureurs apparaissent déformés sur celles-ci. Placées sur le côté, à l’exact perpendiculaire de la ligne d’arrivée, les caméras utilisées pour les photos finish sont des appareils à la pointe de la technologie, capturant 10 000 à 20 000 images par seconde. Mais à la différence d’une caméra traditionnelle, ces clichés sont pris via une fente très étroite en forme d’allumette, permettant d’obtenir des images d’un pixel de large pour 1 024 à 2 048 pixels de haut.
Une fois le dispositif déclenché, ces dizaines de milliers d’images d’un pixel de large sont chronologiquement mises bout à bout. Il en ressort un cliché sur fond blanc que l’on nomme photo-finish. Une appellation pouvant prêter à confusion puisqu’il ne s’agit pas d’une image instantanée réalisée à un instant T.
Le cliché que l’on voit apparaitre est en réalité une représentation temporelle de ce qu’il s’est passé au niveau de la ligne d’arrivée. Afin de mieux comprendre la différence, il faut retenir qu’une photographie traditionnelle montre une variété d’endroits à un moment fixe quand une photo finish dévoile une variété de moments à un endroit fixe. Chaque pixel de large présent sur le cliché a été pris dans l’axe de la caméra. Ainsi, cela explique pourquoi sur une photo-finish, tous les sprinteurs « cassent » avec leur buste et tous les cyclistes jettent leur vélo. Qu’ils apparaissent en premier ou loin derrière les autres sur le cliché, ils ont tous été pris à l’instant où ils franchissaient la ligne d’arrivée.
Puisqu’il s’agit d’une reconstitution temporelle, l’écart séparant deux coureurs sur une photo-finish ne se mesure donc pas en distance mais en temps. Pour une caméra enregistrant 10 000 images par seconde, un pixel correspond à un intervalle de 0,0001 secondes. Un système d’une extrême précision, permettant à coup sûr de départager deux coureurs même lorsque l’écart est indétectable à l’œil nu.
Sur le Tour de France
Pour séparer deux sprinteurs lancés à plus de 70 km/h, les commissaires du Tour peuvent désormais compter sur un système très pointu, n’ayant cessé de se perfectionner depuis sa première apparition sur la Grande Boucle en 1955.
Assurée par l’horloger suisse Tissot, la photo-finish prise au terme de chaque étape est assurée par deux caméras situées de part et d’autre de la ligne d’arrivée. Synchronisées entre elles, les 10 000 images par seconde qu’elles capturent sont instantanément envoyées à la cabine de chronométrage située à côté de la ligne. Sur leur écran d’ordinateur, l’équipe de huit personnes en charge d’établir le classement à l’arrivée voit apparaitre la photo finish dans la seconde qui suit. Ils ont dès lors une vingtaine de secondes pour annoncer aux organisateurs le nom du vainqueur, le top 10 de l’étape et le nouveau classement général.
Tout doit aller très vite et aucune erreur ne doit être commise. Lors des arrivées les plus serrées, un curseur rouge permet de séparer au pixel près l’avant du boyau de deux cyclistes. Un outil très utile, ayant permis en 2017 de déclarer Marcel Kittel vainqueur de la 7e étape devant Edvald Boasson Hagen pour 3/10 000e de seconde. Soit un écart de trois pixels sur la photo finish, correspondant à six millimètres sur la ligne d’arrivée.
Pour en savoir plus :
https://cnosf.franceolympique.com/cnosf/actus/4989-la-photo-finish.html