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Depuis 2019, le record de l’arrêt au stand le plus rapide est détenu par l’écurie Red Bull, lorsque leurs mécaniciens changèrent les quatre pneus de Max Verstappen en 1,82 secondes.
En Formule 1, un simple arrêt au stand de quelques secondes peut faire basculer le destin d’un Grand Prix ou de tout un championnat. Le réaliser à la perfection n’offrira sans doute pas la victoire. En revanche, y perdre du temps c’est s’handicaper et accumuler un retard difficilement rattrapable en piste. Pour éviter ce désagrément, la chorégraphie doit être maitrisée. Chaque détail compte et chacun des mécaniciens présents autour de la monoplace possède un rôle bien défini. Voici comme se déroule ce merveilleux ballet.
Une mise en place rapide, précise et immédiate
L’exécution d’un arrêt au stand débute sur le muret des stands. Après discussion entre le directeur d’équipe, les ingénieurs et les stratèges, c’est ici, depuis la cabine de commandement que l’écurie informe son pilote, via la radio, qu’il doit se diriger vers les stands.
Ce dernier reçoit l’ordre une quarantaine de secondes avant l’entrée de la voie, parfois moins lorsque la décision a été précipitée. Pendant ce court laps de temps, les mécaniciens sélectionnés pour exécuter l’arrêt sortent du garage, récupèrent les gommes neuves et se mettent en position.
Le pilote entre dans la voie des stands. Afin de perdre le moins de temps possible, il freine brutalement puis actionne sur son volant un limiteur de vitesse l’empêchant de dépasser les 60 km/h autorisés dans cette voie. Une fois à hauteur de son garage, il dispose d’à peine quelques dixièmes pour s’insérer entre les mécaniciens et s’immobiliser à l’emplacement prévu. Pour faciliter le travail de toute l’équipe, l’arrêt doit être millimétré. Quelques centimètres de trop ou de moins peut perturber la chorégraphie. En guise de repère visuel, il peut compter sur un mécanicien chargé de lui tendre un panneau « sucette » devant lui. De nos jours, il s’agit d’une flèche lui indiquant où placer ses roues avant. La monoplace est immobilisée, le feu situé au-dessus de ses yeux est rouge, le travail des mécaniciens peut débuter.
À chacun son rôle
Disposés à l’avant et à l’arrière, les deux hommes équipés d’un « lève-vite » ouvrent le bal. Leur mission, très physique, consiste à soulever à l’aide de cet appareil les 800 kg de la monoplace en quelques dixièmes de seconde. Une fois surélevée, les mécaniciens placés au niveau des roues entrent dans la danse.
Ils sont au total trois pour chaque pneu. Pour une question de rapidité, le premier d’entre eux commence à dévisser l’écrou de la roue avant même que la Formule 1 soit totalement immobilisée. Il y parvient grâce à un puissant pistolet pesant plus de quatre 4 kg, permettant de desserrer l’écrou en un temps record grâce à sa vitesse de rotation de 15 000 tours par minute. Placé à ses côtés, un second mécanicien retire le pneu usé, puis le troisième insère la gomme neuve avant que le premier revisse le tout avec son pistolet. Bien exécuté, ce mouvement à trois se déroule en moins de deux secondes. Une prouesse lorsque l’on manie des pneus de 20 kg.
Ces douze mécaniciens chargés de changer les gommes ne sont pas les seuls autour de la monoplace. De part et d’autre de cette dernière, deux stabiliseurs sont placés au niveau du cockpit. Leur rôle : Maintenir la Formule 1 droite et vérifier en quelques secondes la propreté du système d’aération.
Devant, un mécanicien est parfois réquisitionné pour modifier les réglages de l’aileron avant. Grâce à une visseuse qu’il insère à l’emplacement prévu, il vient ajouter ou retirer des quarts de tour et ajuste ainsi l’appui aérodynamique. Lorsque cet aileron avant doit être changé, cinq à huit mécaniciens interviennent et exécutent une opération faisant perdre plusieurs secondes.
Enfin, tous ces hommes sont secondés par des remplaçants, au cas où un problème physique leur empêcherait de tenir leur rang. Poste le plus à risque, les deux mécaniciens en charge de soulever la monoplace disposent à titre d’exemple d’une doublure équipée elle aussi d’un « lève-vite ». Quant au pistolet utilisé sur les écrous des pneumatiques, un second de substitution est placé au niveau de chacune des roues, si le premier venait à être défaillant.
L’ensemble de cette chorégraphie millimétrée est surveillé de près par un chef d’orchestre que l’on nomme superviseur. Se tenant légèrement en retrait, il dispose d’une télécommande lui permettant de retenir la monoplace en empêchant le feu de passer au vert. Un bouton qu’il actionne s’il constate un problème sur la Formule 1, ou pour éviter une collision lorsqu’un adversaire vient à passer au moment de la sortie de son pilote.
Quand l’arrêt au stand est parfaitement exécuté et se déroule sans accroc, les instruments utilisés, tous connectés à un centre de contrôle, envoient un signal une fois la tâche du mécanicien terminée. À la réception de tous ses signaux, le feu passe automatiquement au vert. Le pilote, n’ayant cessé d’avoir les yeux rivés dessus, peut enclencher la première et ressortir de son stand. Limité à 60 km/h jusqu’au bout de la voie, il ressort de cette dernière seulement une vingtaine de secondes après y être entré.
Cette danse exécutée à la perfection à chaque Grand Prix ne pourrait être aussi fluide sans un entrainement rigoureux. Chaque week-end, ces mécaniciens répètent ce geste une soixantaine de fois avant la course du dimanche. La semaine, ils s’exercent à l’usine et suivent un entrainement spécifique à base de renforcement musculaire, d’exercices de motricité, d’équilibre et de rapidité. Une préparation venant s’ajouter à leur planning déjà très dense.
Car ces hommes en charge d’effectuer les arrêts au stand ne sont pas des sportifs de haut niveau missionnés spécialement pour cette tâche. Non. Ce sont en premier lieu des mécaniciens possédant de véritables fonctions au sein de l’écurie. Les week-end de course, quand ils n’effectuent pas d’arrêt aux stands, ils travaillent sur le réglage des monoplaces, apportent des modifications ou réparent ces dernières lorsque cela est nécessaire.