Pour une meilleure équité entre les athlètes et éviter qu’une gêne ou une bousculade ne vienne perturber leurs performances sportives, les pistes d’athlétisme sont de nos jours équipées de huit à neuf couloirs. Très réglementés, ces derniers mesurent très précisément 1,22 mètres de large tandis qu’on observe un décalage au départ des courses de 200m, 400m et 800m pour compenser les virages. Mais au fait, depuis quand les pistes d’athlétisme possèdent ces couloirs ?
Des premières pistes tantôt dépourvues de couloirs
Au cours des premières olympiades antiques, le stadion était l’unique épreuve au programme. Une course sprint mesurant comme son nom le laisse entrevoir la longueur du stade d’Olympie soit environ 192 mètres. Courue en ligne droite, chacun des concurrents était placé dans un couloir délimité par des cordes. Disputé un peu partout en Grèce dans le cadre d’autres manifestations sportives, les pistes sur lesquelles se déroulait le stadion pouvaient posséder plus de vingt couloirs pour les plus grandes d’entre-elles, tandis que la largeur de ces derniers variait de 80 cm à près d’1,30 mètres.
Lors du renouveau de l’athlétisme au cours du XIXème siècle, les premières pistes construites se dotèrent de virages, adoptèrent la distance de 440 yards puis 400 mètres, mais n’étaient pas systématiquement équipées de couloirs. Certaines en possédaient, d’autres non. Lorsque des épreuves étaient courues sur des pistes dénuées de couloir, les athlètes pouvaient alors se placer comme bon leur semblait et avait, dans le cadre de certaines compétitions, le droit de bloquer leurs adversaires pour éviter d’être doublés.
Imbroglio autour de la finale du 400m des Jeux de 1908
Le White City Stadium de Londres accueillant les épreuves d’athlétisme dans le cadre des Jeux Olympiques de 1908 faisait partie de ces pistes à ne pas posséder de couloirs. Si leur absence n’avait jusque-là posé aucun problème, la finale du 400m se déroulant en fin d’olympiade en fit les frais, accouchant d’un scénario totalement inédit dans l’histoire des Jeux.
Sur les quatre finalistes engagés dans cette quête pour l’or, Wyndham Halswelle était l’unique britannique. Opposé à trois américains, il pointait en deuxième position à l’entrée de l’ultime ligne droite, au coude à coude avec un certain John Carpenter. Un duel des plus serrés qui tourna finalement à l’avantage de ce dernier, franchissant la ligne d’arrivée en premier après s’être notamment décalé dans les derniers mètres pour barrer la route à Wyndham et éviter de se faire dépasser.
Cet acte pas très sportif était parfaitement autorisé aux États-Unis. John Carpenter, en pleine connaissance du règlement en vigueur dans son pays, osa ainsi courir en diagonale et gêner son adversaire sans imaginer un quelconque instant qu’un tel geste était interdit en Angleterre ainsi que dans le cadre des Jeux Olympiques. Naturellement, les juges le disqualifièrent pour son manque de fair-play et demandèrent que la finale soit recourue sans John Carpenter. En guise de soutien envers leur coéquipier déchu, les deux autres coureurs américains se retirèrent de la course. Wyndham se présenta ainsi seul au départ de cette seconde finale et remporta logiquement cette dernière dans un temps anecdotique de 50 secondes.
Pour éviter qu’un incident similaire ne se reproduise à l’avenir, il fut décidé au terme de ces Jeux Olympiques de rendre obligatoire la présence de couloirs sur les pistes d’athlétisme. Chaque concurrent devant rester dans son couloir dédié, il n’était désormais plus possible de gêner ses adversaires, la performance sportive redevenant ainsi l’unique critère capable d’élire un vainqueur. Aussi, pour une meilleure uniformisation des règles aux quatre coins du globe, l’IAAF fut créée quelques années plus tard. Devenue World Athletics depuis 2019, cette instance continue de régir le monde de l’athlétisme et fait office de garant d’un règlement standardisé à l’international.