Crédit : CC BY-SA 2.0 by Aleksandr Osipov
À l’inverse du rugby, du basket-ball et du handball, le chrono ne s’arrête jamais au football. Qu’il y ait une faute, un remplacement, une intervention des soigneurs ou encore un recours à l’assistance vidéo, les minutes continuent de défiler bien que le jeu, lui, soit arrêté. Afin de compenser cette perte de temps de jeu, un temps additionnel est ajouté au terme de chaque période. Pouvant durer une ou plusieurs minutes, il est calculé de manière plus ou moins précise par le corps arbitral, selon la durée des temps morts et leur nature. Explication.
Qu’est-ce que le temps additionnel ?
Dans son règlement en dix-sept points, l’International Football Association Board (IFAB) définit le temps additionnel au travers de la loi n°7 régissant la durée de jeu d’un match. Au troisième alinéa intitulé « récupération des arrêts de jeu », les minutes ajoutées à la fin de chaque mi-temps sont présentées comme une « période pour compenser le temps de jeu perdu occasionné par les remplacements, l’évaluation de la blessure, le transport des joueurs blessés, les manœuvres visant à perdre du temps délibérément, les sanctions disciplinaires, les arrêts de jeu de nature médicale, les vérifications effectuées par assistance vidéo et toute autre cause entrainant un retard important dans la reprise du jeu ».
En dessous de cette définition, deux paragraphes viennent apporter des précisions sur le fonctionnement des arrêts de jeu. Tout d’abord, une erreur de chronométrage en première période ne peut être compensée durant la deuxième mi-temps. Logique. Le second point est quant à lui beaucoup plus intéressant : Malgré les croyances contraires, le calcul du temps additionnel n’est pas à la charge du quatrième arbitre situé au niveau du banc de touche.
Ce dernier indique seulement « le minimum de temps additionnel décidé par l’arbitre à la fin de la dernière minute de chaque période ». Mais la décision finale, elle, reviendra toujours à l’arbitre principal qui peut, s’il le juge nécessaire, ajouter une ou plusieurs minutes supplémentaires à ce temps additionnel minimal. Ainsi, lorsque l’on atteint la 95e ou 96e minute de jeu alors que seulement quatre minutes supplémentaires avaient été annoncées, cela peut paraître excessif certes, mais l’arbitre principal n’enfreint guère le règlement.
En dehors de ces informations, l’IFAB ne s’épanche pas plus sur le sujet. Dans son règlement, l’instance ne dévoile aucun tableau annonçant le temps à ajouter en fonction de l’incident ayant conduit à l’arrêt du jeu. Pour calculer la durée du temps additionnel, les arbitres ne s’appuient donc sur aucune loi écrite, faisant simplement confiance à leur chronomètre et leur instinct.
Le calcul des arrêts de jeu, à la discrétion du corps arbitral
Interviewé au travers de cet article du Figaro, l’ex-arbitre international Tony Chapron, au sifflet de plus de 500 matchs professionnels, a dévoilé quelques règles non-écrites que le corps arbitral s’évertue à suivre afin de calculer au mieux le temps additionnel.
Afin de s’y retrouver et annoncer un arrêt de jeu se voulant le plus juste possible au terme de chaque mi-temps, les arbitres, au lieu de compter à la seconde près le temps de jeu perdu, préfèrent attribuer des forfaits de temps à chaque action entrainant l’arrêt du match. Ainsi, Tony Chapron annonce décompter 30 secondes pour chaque changement et une minute lors de l’intervention d’un soigneur. « Mais ce n’est pas la règle » précise l’ancien arbitre international, « Vous faites de tête, en fonction de l’état d’esprit des uns et des autres, de l’évolution du score… Tout n’est pas calculé à la seconde près parce qu’il y a aussi une sensibilité ». En effet, lorsqu’une équipe chercher volontairement à perdre du temps afin de conserver son avantage au score, l’arbitre tiendra compte de ces actes d’anti-jeu dans le calcul du temps additionnel. À l’inverse, quand la rencontre se termine sur un score fleuve et qu’il n’y a plus aucun suspense, certains arbitres préfèrent donner le coup de sifflet final dès la 90e minute de jeu, sans observer de temps additionnel. « Parfois, les deux équipes elles-mêmes vous disent qu’on peut s’arrêter-là » ajoute Tony Chapron.
Une fois le nombre de remplacements et d’intervention médicales comptés, les arrêts de jeu liés à l’assistance vidéo pris en considération tout comme les actes d’anti-jeu, les contestations et toutes ses actions menant à une perte de temps de jeu effectif, le quatrième arbitre additionne le tout, puis dévoile durant la dernière minute le temps additionnel minimal que l’arbitre principal peut maintenir ou augmenter. Généralement, ces arrêts de jeu ne dépassent que très rarement les cinq minutes par mi-temps. Mais lors de la dernière Coupe du Monde organisée au Qatar, une nouvelle méthode de calcul avait conduit à des temps additionnels à rallonge, dépassant parfois les dix minutes.
Un décompte plus rigoureux lors de la Coupe du Monde 2022
Le record avait été atteint en début de compétition, le 21 novembre lorsque la rencontre entre l’Angleterre et l’Iran se terminait après 117 minutes de jeu. Quatorze minutes de temps additionnel en première mi-temps, douze au terme de la seconde. Du jamais vu lors d’un mondial.
La raison de ces arrêts de jeu exceptionnellement longs provient d’une petite remontrance faite par Pierluigi Collina, ancien arbitre international devenu président de la commission des arbitres à la FIFA. En préambule de la compétition, le célèbre italien au crâne chauve avait affirmé sa volonté de voir plus de temps de jeu, annonçant en conférence de presse vouloir « éviter les matchs à 42, 43, 44 minutes de temps effectif ». « Nous avons demandé aux arbitres d’être rigoureux et d’ajouter ce qui est nécessaire pour compenser les pertes de temps » ajoutait M. Collina. Malgré les polémiques qu’une telle nouveauté suscitait, le corps arbitral appliquait cette demande à la lettre, décomptant avec précision le moindre fait menant à un arrêt du jeu.