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Loin des pratiques dopantes bien trop répandues et très peu originales, certains sportifs ont fait de la triche un art en mettant au point des stratagèmes audacieux méritant que l’on s’y attarde quelques instants. Tantôt drôles, tantôt pathétiques et tantôt dangereux, voici dix cas de triche comptant parmi les plus improbables de l’histoire du sport.
10. La sauteuse en hauteur était en réalité un homme
Quatrième du concours de saut en hauteur aux Jeux Olympiques de Berlin en 1936 puis championne d’Europe en 1938 avec un nouveau record du monde à la clé, les performances et le physique de l’athlète allemande Dora Ratjen interpellèrent bon nombre de spécialistes de la discipline, à commencer par ses concurrentes. Était-ce en réalité un homme ?
Le verdict tomba quelques jours après sa performance aux championnats d’Europe d’athlétisme de 1938. Devant se soumettre à un test médical, Dora Ratjen fut diagnostiquée d’une forme d’hermaphrodisme et considérée dès lors de sexe masculin. Comme en témoigne des exemples plus récents, des cas d’athlètes féminines atteintes d’hermaphrodisme ou d’hyperandrogénisme sont rares mais existent bel et bien.
Sauf que l’histoire de Dora Ratjen fut quelque peu différente. Si on lui attribua le sexe féminin à la naissance, Dora avoua à postériori s’être toujours sentie homme au point de toujours cacher son corps des regards dans les vestiaires. Elle accusa en outre la Fédération Allemande d’Athlétisme de l’avoir forcée à conserver et intensifier ses traits féminins, afin d’être considérée comme une athlète féminine et faire ainsi concurrence à Gretel Bergmann, une sauteuse en hauteur allemande d’origine juive.
Si la Fédération Allemande nia bien évidemment en bloc ces accusations, Dora Ratjen fut déchue de ses titres et de son record du monde, tandis qu’elle changea d’identité et devint Heinrich Ratjen, de sexe masculin.
9. Faire le Tour de France en voiture ou en train
En 1904, la seconde édition du Tour de France fut sans aucun doute la pire de l’histoire, au point qu’Henri Desgrange songea à ne plus renouveler l’expérience et clore définitivement ce chapitre du cyclisme.
Et pour cause, victime de son succès, ce second acte de la Grande Boucle fut entaché par de nombreuses affaires de triche et de comportements anti-sportifs, venant aussi bien des spectateurs que des coureurs. Parmi ceux-ci, on accusa bon nombre de cyclistes d’avoir réalisé une partie du parcours en voiture ou en train. Une aide contraire au règlement, bien que les étapes dépassaient pour certaines d’entre-elles les 400 kilomètres.
Après plusieurs mois d’enquête et de réflexion, Henri Desgrange, en accord avec l’Union Vélocipédique de France, décida de déclasser et suspendre bon nombre de coureurs dont les quatre premiers de cette Grande Boucle. Le jeune Henri Cornet, âgé de 19 ans seulement, est ainsi déclaré vainqueur au terme de cette affaire.
8. Schumacher – Villeneuve, un accident pour un titre de champion du monde
Le duel Schumacher-Villeneuve lors de la saison 1997 de Formule 1 fut l’un des plus serrés de l’histoire. À l’amorce du dernier Grand Prix, les deux hommes pouvaient encore prétendre au titre de champion du monde, séparés par un point seulement en faveur de Schumacher.
Pour le pilote allemand, le calcul était simple. Il devait terminer devant Villeneuve pour décrocher une troisième couronne. Au terme d’une séance de qualification conclue par une incroyable égalité parfaite, les deux rivaux s’adjugèrent la première ligne, laissant présager une bataille sans précédent sur la piste de Jerez accueillant ce Grand Prix d’Europe.
Schumacher prit le meilleur départ et s’envola dès le premier virage. Parvenant rapidement à creuser un précieux écart de plusieurs secondes, il vit Jacques Villeneuve revenir sur lui en seconde partie de course, aidé par le jeu des arrêts au stand.
Au 47ème tour, le pilote canadien se glissa dans les échappements de la Ferrari et l’attaqua à l’entrée d’une épingle. Voyant son titre de champion du monde compromis par cette tentative de dépassement, Schumacher tenta désespérément de tasser son rival mais fut pris à son propre jeu en s’enlisant dans le bac à gravier. Malgré le contact entre les deux monoplaces, la Williams de Villeneuve, elle, resta en piste sans dégât majeur. Méfiant, ce dernier assura son titre de champion du monde en décrochant les quatre points de la troisième place tandis que Schumacher n’eut d’autre choix que l’abandon. Il fut même déclassé du classement des pilotes à l’issue de la course pour cette manœuvre jugée dangereuse et anti-sportive.
7. Le boxeur aux gants de plâtre
Le 26 juillet 2008, un coup de tonnerre frappa le monde de la boxe. Le Portoricain Miguel Angel Cotto, jusque-là invaincu en 32 combats, venait de perdre sa ceinture de champion du monde des poids welters après sa défaite en onze rounds face au Mexicain Antonio Margarito. Comme en témoignait le visage amoché de Miguel Cotto, le combat fut d’une rare violence. Les coups portés par Margarito étaient bien plus dévastateurs qu’à l’accoutumée, si bien que l’entraineur du Portoricain préféra arrêter le combat durant le onzième round, voyant son poulain au bord du K.O, ne pouvant rivaliser avec Margarito.
Quelques mois plus tard, le résultat de ce duel fut remis en cause. Avant son combat face à l’Américain Shane Mosley, on découvrit en effet que sous ses gants, Antonio Margarito portait des bandages composés de plâtre. Suspendu un an pour cette violation au règlement, tout portait à croire qu’un procédé identique avait été utilisé lors de sa victoire face à Miguel Cotto. Une revanche entre les deux hommes fut d’ailleurs organisée trois ans plus tard en 2011. Et devinez quoi ? Le Portoricain s’imposera cette fois-ci en 10 rounds.
6. La victoire au bout d’un marathon de 700 mètres
Le 21 avril 1980, la stupeur était totale à l’arrivée du 84ème marathon de Boston. Rosie Ruiz, une coureuse inconnue au bataillon, venait de remporter seule, devant toutes les autres concurrentes, cette mythique course dans un temps de 2h31, nouveau record de l’épreuve. Jacqueline Gareau, coureuse canadienne arrivée seconde, n’en croyait pas ses yeux. Elle qui avait fait la course dans le groupe de tête du début à la fin pensait avoir course gagnée lorsqu’elle parvint à se détacher de ses concurrentes à quelques kilomètres de la fin. Elle affirmait d’ailleurs ne jamais s’être fait doublée et pourtant, ce jour-là, le public n’avait d’yeux que pour cette mystérieuse Rosie Ruiz, malgré les nombreuses interrogations que sa performance suscita.
Une semaine plus tard, la vérité éclata au grand jour. À 700 mètres de la ligne d’arrivée, des étudiants affirmèrent avoir vu Rosie Ruiz enjamber les barrières et s’introduire sur le parcours. En effet. Ce jour-là, la coureuse cubano-américaine avait réservé un hôtel non-loin de la ligne d’arrivée du marathon de Boston. Avant même le passage des premières concurrentes féminines, Rosie Ruiz descendit dans la rue, s’aspergea d’une bouteille d’eau et rejoignit le parcours le plus discrètement possible. Mimant d’être au bord de l’épuisement une fois la ligne franchie, Ruiz apparut bien fraiche et en forme au regard des spécialistes de la discipline. Des premiers soupçons qui s’accentuèrent quelques instants plus tard lorsqu’elle délivra durant son interview des réponses incohérentes révélant son statut de coureuse novice, experte en matière de triche.
Oui. Rosie Ruiz n’en était pas à son coup d’essai. Quelques mois avant sa pseudo victoire à Boston, la coureuse cubaine prit part au marathon de New York qu’elle termina en 2h56. Abandonnant au bout de 30 minutes d’effort, elle prenait ce jour-là le métro pour rallier la ligne d’arrivée et impressionner sa famille venue l’encourager.
5. Il simule une blessure pour forcer un changement de joueur
Cette affaire que l’on nomma « Bloodgate » fit couler beaucoup d’encre de l’autre côté de la Manche.
En avril 2009, dans le cadre de la Coupe d’Europe de rugby, le club anglais des Harlequins recevait à Twickenham le Leinster pour une place en demi-finale. Alors que l’on s’approchait du terme de la rencontre et que les Harlequins étaient menés d’un petit point seulement, l’un de leurs joueurs, le trois-quarts Tom Williams, fut contraint de céder sa place, visiblement ouvert au niveau de la lèvre. Nick Evans, le buteur star de cette équipe le remplaça à la hâte mais ne put éviter la déroute des siens, manquant notamment un drop à la toute dernière minute de jeu.
Quelques mois après ce fait de jeu semblant totalement anodin, il fut révélé dans la presse que Tom Williams avait en réalité simulé sa blessure dans le but de céder sa place. À terre, plaqué sous d’autres rugbymen, ce dernier profita d’être à l’abri du regard des arbitres et des caméras pour mordre dans une poche de faux sang. Lorsque son staff médical vint à sa rescousse, l’un de ses médecins entailla sa lèvre avec un scalpel. Les arbitres constatèrent cette fausse blessure et autorisèrent les harlequins à procéder à un changement supplémentaire, faisant entrer leur buteur Nick Evans.
L’affaire fit grand bruit et entraina de lourdes sanctions. Pour avoir simulé cette blessure, Tom Williams fut suspendu pour une durée de quatre mois. Les Harlequins reçurent une amende de 300 000 € quant à leur entraineur Dean Richards, la tête pensante à l’origine de ce subterfuge, ce dernier fut radié du monde du rugby durant trois années.
4. Il trafique le système de touche pour s’imposer en escrime
Nous sommes aux Jeux de Montréal de 1976. Le pentathlète russe Boris Onishchenko, déjà double médaillé olympique lors des précédents Jeux, était cette année-là de grand favori et pouvait légitimement espérer décrocher le titre en équipe en compagnie de ses coéquipiers.
Alors que l’URSS était classé quatrième au terme de la première épreuve, vint l’escrime, deuxième discipline du pentathlon moderne. Boris Onishchenko, considéré comme le meilleur escrimeur de la compétition, faisait figure d’épouvantail et pouvait permettre à l’URSS de remonter au classement général. Un statut qu’il comptait parfaitement assumer, en ayant toutefois recours à la triche.
Lors de son duel qui l’opposa au britannique Jim Fox, il disposa sous la poignée de son épée un petit interrupteur qui, relié au système électronique, permettait d’allumer la table de marque sans avoir à toucher son adversaire. Lors d’un des assauts, l’équipe Britannique porta réclamation. La table venait en effet de s’allumer sans même que Boris Onishchenko n’ait atteint Jim Fox. Immédiatement, on confisqua l’arme du pentathlète soviétique. Après l’examen des commissaires, l’interrupteur fut découvert. La supercherie de Boris Onishchenko entraina la disqualification de toute son équipe, tandis que ce dernier fut radié à vie de la famille olympique. Une légende raconte qu’à son retour en URSS, Onishchenko aurait été envoyé dans un goulag aux confins de la Sibérie. Mais jamais personne ne fut en mesure de vérifier une telle hypothèse.
3. Distancé, il se laisse prendre un tour pour l’emporter
Sylvester Carmouche est un homme plein d’audace. En 1990, lors d’une course hippique organisée sur l’hippodrome de Delta Browns en Louisiane, ce jockey crut bien berner les officiels comme les spectateurs lorsque distancé des favoris, il décida de s’arrêter et se faire prendre un tour afin de réintégrer le groupe de tête et l’emporter.
Mais malgré l’épais brouillard qui régnait ce jour-là, les juges n’étaient pas dupes. Tout heureux de sa fructueuse supercherie, Carmouche retomba vite sur terre lorsqu’il apprit sa disqualification, puis sa suspension de dix ans pour triche en pleine course. Comme quoi l’audace ne paye pas toujours.
2. Le bidon en plomb de Jean Robic
La faible corpulence du coureur breton fit de lui l’un des meilleurs grimpeurs de sa génération. Gagnant de précieuses secondes dans les ascensions les plus raides, il avait la fâcheuse tendance à les perdre une fois la descente venue, trop léger pour espérer rouler aussi vite que ses adversaires.
Alors, à l’occasion du Tour de France 1953, lui et son directeur sportif Léon Le Calvez eurent une idée plutôt ingénieuse : Lester le vélo avec un bidon en plomb. La veille d’une étape pyrénéenne entre Cauterets et Luchon, les deux hommes se rendirent chez un artisan et en ressortirent avec le précieux bidon, alourdi avec pas moins de 9kg de plomb en son sein. Au sommet du col du Tourmalet, Jean Robic avait alors ordre de simuler un problème mécanique sur son vélo afin que Léon Le Calvez puisse intervenir et glisser en toute discrétion ce lest avant d’entamer la descente.
Mais le plan ne se déroula guère sans accroc. Jean Robic oubliant de simuler un ennui mécanique, Le Calvez dut redoubler de ruse pour approcher son coureur. Parvenant à le faire malgré la présence des commissaires, il plaça le bidon de plomb en bas du cadre avant que Robic n’attaque la descente tambour battant. Perturbé par ce poids supplémentaire modifiant le comportement de son vélo, le cycliste breton chuta lourdement dans la descente. Parvenant à récupérer in-extremis le bidon avant que celui ne dévale le flan de la montagne, il le remit à Léon Le Calvez et s’en alla malgré ses déboires remporter l’étape, faisant coup double en récupérant la tunique jaune le soir même.
Les jours suivants, Robic et Le Calvez préférèrent ne pas réitérer l’expérience. Ayant eu vent de cette histoire quelque temps après le terme de ce Tour de France, le directeur de course Jacques Goddet ajouta un nouveau point au règlement. Dès lors, il était interdit de lester son vélo et remplir son bidon avec autre chose que du liquide.
1. Le gardien de but qui rapprochait ses poteaux
En septembre 2009, Kim Christensen, le gardien danois de l’IFK Göteborg, fut surpris en plein match par l’arbitre en train de rapprocher ses poteaux. Une façon de tricher improbable, possible dans le championnat suédois du fait que bon nombre de terrains soient en synthétique.
L’arbitre de la rencontre venant remettre ses poteaux en place sans même le sanctionner, Christensen n’écopera d’aucune peine, simplement parce que les instances de football n’avaient jamais imaginé un tel scénario. Interviewé le lendemain sur son geste, il avouera auprès des journalistes avoir déjà rapproché ses poteaux lors de nombreux matchs.